Este é o título de um artigo de Dominique Wolton publicado no Le Monde. É uma reflexão muito interessante efectuada na sequência do referendo de 29 de Maio, mas é mais do que isso. Numa altura em que, por causa da Europa e por causa dos "assuntos domésticos", a eficácia da comunicação política volta a estar em causa, Wolton chama a atenção dos dirigentes e da opinião pública para duas ou três coisas essenciais destinadas a evitar "surpresas", se é que ainda é possível evitá-las. Lá como cá, aliás.
Le 29 mai fait apparaître cinq faits. Une réelle incommunication entre pays légal et pays réel. D'un côté les élites, les urbains, les plus âgés. De l'autre les ruraux, les plus pauvres, les jeunes. Un casse-tête qui ne recoupe pas les frontières politiques. Un rejet du libéralisme dont l'Europe devient le symbole, même si elle en était une tentative d'organisation. Une immense colère contre la crise économique et sociale. Le refus d'une Constitution pas assez débattue et symbole des abandons de souveraineté difficiles à accepter. L'arrogance des élites se retourne contre elles avec la fin du chantage à l'"intelligence" , à la compétence. Le non n'était même pas pensable... Pourtant, en cas de suffrage universel, il n'y a plus de hiérarchie entre ceux d'en haut et d'en bas. Enfin, c'est la preuve que ni les médias ni les élites ne font l'opinion et l'élection : les deux, dans l'ensemble, étaient favorables au oui. On a donc assisté à la rencontre des deux non. Le non français contre la majorité actuelle, et le non européen contre l'eurocratie. Les deux non se sont tissés ensemble, brouillant une fois de plus, et c'est l'originalité de l'Europe, le clivage gauche/droite. Avec cette question sans réponse : le non français aurait-il été plus faible si Jacques Chirac avait en 1995, 2002 et 2004 pris en compte le vote des Français ? Le boomerang moins fort ? Ce qui relance la contradiction inhérente à la démocratie de masse médiatisée : pas d'action possible du pouvoir sans un minimum de durée et de stabilité. Mais, simultanément, impossible de ne pas écouter les citoyens. Au-delà, il faut réfléchir au rôle essentiel de la communication politique, véritable moteur de la démocratie. La communication politique ce n'est ni les paillettes, ni le marketing, ni la publicité. C'est au contraire l'espace symbolique, constitué par le jeu des acteurs politiques, des médias, de l'opinion publique, et la circulation de leur discours. Pas de démocratie avec un grand nombre d'acteurs, le suffrage universel, beaucoup d'informations, de médias, de sondages, sans une réflexion sur le rôle essentiel de ce triangle de la communication politique. Son risque ? Se refermer, perdre le contact avec la réalité, rétrécir le jeu politique et arriver au découplage auquel on a assisté lors de ce référendum. Un exemple. Dès le dimanche soir, dans tous les débats, la ronde des explications avait repris. Tout le monde savait déjà quoi dire et penser. Aucun silence. Aucun doute. En quelques minutes, l'événement était avalé, neutralisé... Pourquoi si peu de modestie et d'autocritique ? Pourquoi ignorer à ce point que les citoyens ne sont pas dupes ? Que cette classe dirigeante médiatisée, pointe visible de l'iceberg, fasse attention : elle laisse dans l'ombre ces milliers d'élus - nationaux, régionaux, locaux - qui ont souvent une bien meilleure compréhension de la société que ces élites, elle oublie les syndicats, associations, mouvements d'éducation populaire, systématiquement identifiés à des corporatismes. Les citoyens voient tout et savent tout. Ils n'ont pas toujours raison, mais impossible de construire ce nouvel espace politique en sous-estimant à ce point les récepteurs qu'ils sont. Quant à l'opinion publique, l'Europe est sans doute le secteur où la tentation de la réduire aux sondages est la plus forte et la plus dangereuse. Ne sachant pas comment se forment les opinions sur cet immense Far West, on y transcrit les méthodes existant aux plans nationaux. L'Europe est à la fois un espace commun fait d'économie et un espace politique qui s'élargit lentement. Mais ce n'est pas encore un espace public nécessitant un minimum de langue, représentations, idéologies, enjeux communs. Les "opinions" des uns et des autres ne veulent pas dire la même chose. Et c'est normal. Alors pourquoi croire que la multiplication des sondages compensera ou suffira à faire naître un espace public ? Mieux vaut d'abord interroger l'histoire, comparer, affronter l'altérité, voyager, comprendre que l'on ne comprend pas. En un mot admettre que la question des opinions européennes n'a rien à voir avec celle de chacune des opinions nationales. Une opinion sur l'Europe, chez un individu, suppose comprendre un petit peu les rapports entre information, connaissance, représentation, idéologie, stéréotype, rumeur, préjugé. Oui aux sondages, mais pas comme substitution à une réflexion théorique et imaginaire. D'autant que l'opinion publique est une figure partielle du citoyen. Plus on respecte sa complexité, plus on respecte celle du citoyen européen à construire. Le rôle des médias, comme toujours, a été central pour expliquer les enjeux et organiser des confrontations. Surtout quand ils ont réalisé l'ampleur du non. Le contenu des débats aurait-il conduit à un autre résultat si les médias avaient commencé plus tôt ce travail d'explication et de débats ? A leur décharge, les opinions politiques ne manifestaient guère hier d'intérêt aux questions européennes. En réalité, les médias sont le moteur de la communication politique, mais à deux conditions. D'abord éviter d'être trop liés aux élites et conserver la fonction de médiation entre les différents milieux de la société. Ils doivent refléter l'hétérogénéité de celle-ci. C'est leur rôle démocratique. D'autant qu'en haut les dirigeants n'ont souvent plus de rapports avec la réalité et n'y accèdent qu'à travers les médias. Si les médias ne reflètent pas mieux la diversité, le risque d'incommunication augmente. Et le nombre de supports ne suffit pas à rendre plus transparente et compréhensible la société, car tous parlent de la même chose, au même moment. Pas assez ouverts, pas assez pluralistes, trop conformistes. L'espace médiatique ne transcrit pas assez l'hétérogénéité culturelle et sociale. Ensuite, les médias doivent éviter de devenir simples commentateurs de sondages. Il y a trop de sondages commandés ou commentés. On serait effaré, tous médias confondus, de voir sur une seule journée le nombre d'informations qui se réduisent à un commentaire de sondage. A croire que les journalistes ne savent plus faire que cela, réduisant la place de toutes les autres compétences pour donner une autre vision de la politique. Les médias ne sont pas les porte-voix des hommes politiques et des sondeurs, et doivent refléter les autres opinions. Ils sont garants de l'hétérogénéité, faute de quoi il n'y a pas de respiration démocratique. La communication politique est donc au coeur de la construction de l'Europe, mais à condition de reconnaître qu'elle ne recoupe pas les clivages traditionnels, et en dépassant les logiques de "chantage" qui ont été utilisées jusqu'à aujourd'hui. A condition aussi d'admettre qu'il ne peut y avoir d'Europe politique sans un minimum de croissance et de solidarité. Sans oublier l'importance des identités et de la diversité culturelle. Enfin, si, avec le non français, rien ne sera plus comme avant, c'est aussi à condition de ne pas nier la liberté des autres, de ne pas imposer sa loi. Autrement dit, la grandeur de la communication est de construire la cohabitation politique en Europe. Donc la tolérance.
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